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mercredi, 29 avril 2009

Discours de remise de l’Ordre National du Mérite à Jean-Christophe Parisot

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Cahors, le 18 avril 2009

Madame le Préfet

 

 

Monsieur le secrétaire général de la Préfecture

Messieurs les sous-préfets

Monsieur le délégué ministériel chargé de l'emploi des personnes handicapées au ministère de l'Education Nationale,

 

 

Mes premiers mots iront vers vous, Madame le Préfet, pour vous remercier de nous accueillir ici, en vos salons.

 

Et je suis très heureuse que la manifestation organisée aujourd’hui ici, me permette de vous retrouver après quelques années.

 

En effet, j’ai eu le plaisir de travailler avec vous lorsque vous étiez secrétaire générale de la préfecture de la Somme à Amiens, ville de Jules Verne ou est érigée la plus vaste cathédrale gothique du monde, le poste que Jean-Christophe occupe aujourd’hui ici : alors Jean-Christophe, il te reste à suivre les traces de Marcelle Pierrot car je suis sûre que tu apprends beaucoup en travaillant aux côtés de ce grand serviteur de l’Etat !

 

Mais si je suis là aujourd’hui, ce n’est pas que pour retrouver des Amiénois ou anciens Amiénois. C’est d’abord et avant tout pour mettre à l’honneur une personne exceptionnelle à plus d’un titre.

 

Et je voulais te remercier, Jean-Christophe, de m’avoir choisie pour te remettre cette décoration que tu mérites tant !

 

Lorsque j’ai réfléchi à ce que tu représentais pour moi, plusieurs mots se sont imposés : force, modestie, profondeur, sens des responsabilités et fidélité.

 

Je ne prétends pas te réduire à ces seuls mots car ce que tu es vraiment les dépasse, mais ils résument à mes yeux ce qui est essentiel, ce qui fait ton essence.

Force d’abord. Cette force qui soulève les montagnes. Cette force intérieure qui se moque bien de la force physique.

 

On la devine quand on te regarde dans les yeux.

 

Cette force te permet de te battre tous les jours contre la maladie. Je sais bien que ce combat est difficile. Tu l’as dit, à demi-mot, pudiquement, dans ton livre Vivre même si je souffre.

 

Mais elle est là, au fond de toi. Elle te pousse. Elle te fait surmonter les défis.

C’est elle qui te permet de tenir, de surmonter ta lourde tâche de secrétaire général de la préfecture du Lot malgré les heures de kinésithérapie quotidiennes, malgré le corset qui te maintient mais parfois t’irrite, malgré la trachéotomie qui t’impose de n’être jamais seul ce qui, je le sais, te coûte souvent.

 

C’est cette force qui, déjà lorsque tu étais étudiant, le premier étudiant en fauteuil à Sciences-po Paris, t’avait permis de surmonter tous les obstacles. Je me souviens de notre première rencontre, à cette époque. J’avais été frappée par ce jeune qui exprimait des convictions si fortes.

 

Modestie ensuite. Pendant plus de quinze ans, tu as travaillé dans l’ombre sans chercher ni remerciements ni reconnaissance. Simplement, tu écrivais tous les discours de Gilles de Robien : ceux qu’il prononçait en des occasions importantes, comme lors de la traditionnelle cérémonie des vœux, mais aussi dans des circonstances plus ordinaires, comme lorsqu’il recevait les fleuristes pour le 1er mai ou encore les employées municipales  pour la fête des mères. Et chaque année, tu trouvais une anecdote, un évènement historique, une citation à mettre en valeur. Et à chaque discours, tu acceptais les modifications demandées par les autres membres du  cabinet.

 

Ce qui te pesait, je le sais, c’est de ne pas pouvoir écouter toi-même les discours que tu avais écrits.

 

Aujourd’hui, juste retour des choses, c’est toi que l’on écoute et dont on attend les paroles et les actes !

 

C’est encore la profondeur de tes convictions qui te caractérise. Dès la fac, tu t’es engagé et tes combats sont nombreux. Toujours prêt à foncer quand il s’agit de défendre des causes auxquelles tu crois. Si tes jambes ne te portent pas, elles sont remplacées par des paroles fortes, une force de conviction incroyable, sans oublier un réseau amical dont je reparlerai.

 

Et ce fut la création du Collectif des Démocrates Handicapés. Si tu n’as pas pu mener à son terme ton projet de te présenter à l’élection présidentielle, tu as réussi le tour de force de permettre l’élection dans toute la France de conseillers municipaux handicapés. Aujourd’hui, cela paraît évident mais  à l’époque, il t’a fallu lever bien des obstacles et des a priori. Mais tu l’as fait. Tu t’es même présenté dans la Somme à l’élection sénatoriale en 2004. Décidément rien ne t’arrête !

 

Plus récemment, un autre projet a surgi dans ton esprit : créer une association destinée à recueillir des fonds pour faire avancer la recherche dans le domaine des myopathies, et plus particulièrement l’alpha-sarcoglycanopathie. A vues humaines, un projet fou car comment collecter suffisamment d’argent ? Mais toi, tu fonces et tu entraînes avec toi et autour de toi des personnes qui se mobilisent.

 

A ce stade de mon propos, je veux bien sûr saluer le travail du docteur Richard qui, elle aussi, vient d’être décorée de l’Ordre National du Mérite et qui a redonné l’espoir à Jean-Christophe, à ses sœurs et à tous les patients atteints de cette maladie si envahissante dans la vie de tous les jours.

 

Bien sûr, je ne peux pas ne pas parler de l’engagement diaconal de Jean-Christophe. Sans m’étendre sur le sujet, je tiens à dire ici combien il est, là encore, un exemple et un modèle.

Tu aurais pu vivre en chrétien avec Katia. Mais cela ne te suffisait pas. Tu voulais aller plus loin, communiquer, témoigner de ta foi, être un serviteur de l’Eglise.

Sens des responsabilités aussi. Tu ne t’engages pas à la légère.

 

C’est ce trait de ton caractère qui t’a amené à mettre au second plan ta fonction diaconale car tu sais bien que, dans le monde dans lequel nous vivons, tu ne peux pas être diacre et sous-préfet sur le même territoire. Alors tu as fait un choix, en conscience…

 

Mais c’est pour la même raison que, il y a quelques années, tu as passé une thèse de doctorat en sciences politiques. J’imagine les problèmes matériels qu’il a fallu surmonter, l’emploi du temps à gérer. Rien ne t’a arrêté car tu voulais assurer la sécurité de ta famille en passant du statut de contractuel à celui de fonctionnaire, plus sécurisant…

Fidélité enfin, à Katia, ton amour de jeunesse, bien sûr, mais aussi fidélité en amitié. Tu as su, avec Katia, fédérer autour de vous une chaîne d’amitié. Des amis d'une extraordinaire diversité, des amis qui ne se seraient jamais rencontré sans vous car vous avez le don de créer du lien, d’établir des ponts entre les personnes.

 

Je pense à tous ceux qui venaient déjeuner avec toi à l’Hôtel de Ville, à ces amis venus de Valenciennes pendant les vacances de Noël pour passer une soirée, à cet autre qui habite maintenant Nice et qui est le parrain d’un de tes enfants, à tous ces autres dont je pourrais citer les prénoms…

 

Et à tous ces amis, tu fais croire avec délicatesse  qu’ils t’aident quand ils essaient maladroitement de te faire boire ou de te donner à manger, alors que c’est toi qui nous aide, nous réconforte et nous conseille…

 

Je sais bien que la vie n'est pas toujours facile pour tes proches et pour toi mais je suis très heureuse que, maintenant, tu puisses, dans ton métier, donner le meilleur de toi-même, humainement et intellectuellement.

 

J'en suis heureuse pour toi, bien sûr, mais aussi pour tes administrés. Car je dois dire que je m'en voudrais d'être la seule, ou quasiment, à bénéficier de tes conseils avisés sur les dossiers et de la justesse de tes analyses.

Tu étais notamment encore en poste au cabinet du Maire d’Amiens et du Président d’Amiens Métropole lorsque j’ai accédé au Parlement européen et, je peux le dire aujourd’hui, sans ton soutien, tes conseils et ta vision politique des dossiers européens, le début de mon mandat n’aurait pas été aussi satisfaisant. Grâce à toi, mes assistants parlementaires et moi-même étions parés pour embarquer dans la grande aventure européenne, toujours à construire, toujours en mouvement.

 

Alors Jean-Christophe, au moment de te remettre cette décoration que la République Française veut te remettre pour te remercier de tout ce que tu lui as apporté, je veux te dire moi aussi un profond merci : merci pour l’exemple que tu donnes à tous ceux que la vie n’a pas épargnée, merci pour ta force de caractère, merci pour ton humilité qui démontre qu’il ne faut pas se fier aux apparences, merci enfin et surtout pour ton amitié car il n’est de richesse que d’hommes !

 

Dans la postface du livre que j’ai publié il ya quelques mois, tu écrivais : « Il n’est pas donné à tout le monde de reconnaître les problèmes des autres et de s’investir à fond pour les résoudre. Prendre en compte les difficultés de ses concitoyens est bien une vocation. Elle ne laisse pas indemne ».

 

Saches que cette phrase, tu aurais pu l’écrire pour toi-même. Ton quotidien aurait pu être dominé par les Ténèbres et, grâce à ton énergie, ton caractère désarmant et ta force de vie incroyable, j’ai envie de dire surhumaine, tu as fait de ton existence une source de Lumière vouée aux autres, aujourd’hui en te vouant corps et âme au Service de l’Etat.

 

C’est pourquoi, cher Jean-Christophe, à l’heure où je vais te décorer, au nom du Président de la République Française, de l’Ordre National du Mérite, je voudrais avoir une pensée pour toutes les personnes qui vivent aujourd’hui l’Expérience de la Nuit et que la société a exclue. Ton parcours les honore et prouve que, quelles que soient les circonstances et les situations, tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits, comme le rappelle notre Nation, et ont la possibilité, par leurs choix et leurs actions, de faire triompher la Vie.

 

 

 

Brigitte Fouré,

 

Députée européenne

Conseillère municipale d'Amiens

Maire d'Amiens de 2002 à 2007

08:00 Publié dans France | Lien permanent | Commentaires (0)

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