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samedi, 09 octobre 2010

Liu Xiaobo, Prix Nobel de la Paix 2010

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Ils ont osé. Le Prix Nobel de la paix 2010 a été décerné hier au dissident chinois Liu Xiaobo, malgré les menaces de représailles de Pékin. Mais le lauréat ne viendra pas chercher sa récompense à Oslo comme le veut la tradition. Depuis décembre 2008, cet ancien professeur de littérature de 54 ans croupit dans les geôles de la capitale chinoise, où il purge une peine de onze ans pour avoir corédigé la Charte 08, un texte réclamant simplement plus de démocratie. En attribuant la prestigieuse récompense à une des bêtes noires du régime communiste, le Comité Nobel norvégien a salué «le plus grand symbole de la lutte pour les droits de l’homme en Chine».

 

De la prison aux camps de rééducation

En vingt ans de combat, ce vétéran de la dissidence a enchaîné les périodes de détention. En 1989, à peine rentré de New York, où il enseignait à l’Université Columbia, Liu Xiaobo s’impose comme une des figures de proue de la contestation étudiante de Tian’anmen. La veille du massacre, c’est lui qui initie la grève de la faim sur la fameuse esplanade pékinoise. Dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, alors que les chars de l’armée avancent sur la place, il fait partie des médiateurs qui tentent d’obtenir une évacuation pacifique. En vain. Comme nombre de ses camarades, il sera arrêté à l’issue de la répression, puis incarcéré pendant vingt mois, sans jugement.

L’opposant est ensuite

condamné, en 1996, à trois ans de détention dans un camp de «rééducation par le travail», pour avoir réclamé une réforme politique et la libération des anciens manifestants de Tian’anmen. A sa sortie, en 1999, il opte pour la résistance pacifique. Exclu de l’université, il devient un des animateurs du Centre indépendant Pen Chine, un regroupement d’écrivains. S’il ne peut pas être publié en Chine, ses livres, dont Le noble paradis du pouvoir, enfer pour l’humble, sont diffusés à Hongkong. Ses articles, eux, circulent sur la Toile.

Charte 08

Le dernier coup de force de Liu Xiaobo remonte à décembre 2008. A l’occasion du 60e anniversaire de la déclaration des droits de l’homme, il corédige la Charte 08. Cette pétition – inspirée de la Charte 77 qui a marqué le début d’une opposition ouverte au communisme soviétique – appelle à des réformes majeures du système politique et économique chinois. Ce texte demande notamment la fin du monopole du parti, la liberté d’expression et le droit de pratiquer la religion de son choix. Il est signé par plus de 300 personnes, dont certains des plus grands intellectuels du pays.

Pour Pékin, c’en est trop. Il est arrêté peu après la diffusion de la Charte sur Internet. La sentence tombe un an plus tard, à l’issue d’un procès éclair. Ce 25 décembre 2009, le régime ne fera pas de cadeau au dissident chinois. Il est condamné à onze ans d’emprisonnement.

Depuis, les appels à la libération de M. Liu – notamment des Etats-Unis et de l’Union européenne – restent lettre morte. Reste à savoir si, suite à l’annonce d’hier, le président chinois, Hu Jintao, va pouvoir continuer longtemps à faire la sourde oreille.

Le premier recueil de textes en français du nouveau Prix Nobel de la paix – incluant la Charte 08 et les six articles qui l’ont conduit en prison – sortira en mars prochain chez Gallimard.

 

(Source : La tribune de Genève).

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