mercredi, 24 février 2010
Didier Migaud, nouveau Premier Président de la Cour des Comptes
PORTRAIT - Le président socialiste de la commission des finances de l'Assemblée est nommé président de la Cour des comptes
«Une anecdote sur Didier Migaud ? Je n'en ai pas. Vraiment, je ne vois pas.» Le président de la commission des finances du Sénat, Jean Arthuis, a beau réfléchir, rien ne lui vient en mémoire. Pas un bon mot, pas une scène cocasse. Rien. Arthuis fréquente pourtant assidûment Migaud depuis que celui-ci est devenu son alter ego à l'Assemblée, en 2007.
Mais voilà, Didier Migaud est un homme de consensus, «lisse», «toujours au-dessus de la mêlée». Bref, c'est «un type agréable et intelligent», résume Jean Arthuis. «C'est un homme très compétent et affable, très droit, qui a le souci du service public », renchérit son «ami» Laurent Fabius, tout en souriant à l'idée que Nicolas Sarkozy «fasse appel à la gauche» quand il lui faut «faire de grands choix».
Migaud, 57 ans, n'est pas un pur politique. Ce fils de notaire de Château-Chinon, qui est passé tant de fois devant l'hôtel du Vieux Morvan, où François Mitterrand avait ses habitudes, est un technicien qui ne verse pas dans la petite phrase. Discret de nature, il est aussi à des années-lumière du bouillonnant Philippe Séguin, auquel il succède à la tête de la Cour des comptes. «J'avais des discussions un peu vives avec Philippe Séguin. J'espère qu'elles seront plus apaisées avec Didier Migaud», confie d'ailleurs le ministre du Budget, Éric Woerth.
Toutes ces qualités ont valu à Migaud de grimper et de se faufiler. Diplômé de l'Institut d'études politiques de Lyon et titulaire d'un DESS de droit public, Migaud fait ses premières armes au conseil général de l'Isère, où il devient chargé de mission en 1976. Homme fort du département, Louis Mermaz le repère et le fait monter à Paris, en 1981, lorsqu'il est élu président de l'Assemblée nationale. Migaud se cherche alors une existence politique.
En 1986, il est élu conseiller régional de Rhône-Alpes. En 1988, il rafle deux autres mandats, ceux de conseiller général et de député de l'Isère. Sept ans plus tard, il devient maire de Seyssins, puis président de la communauté d'agglomération de Grenoble. Mais c'est à l'Assemblée, où il aura siégé vingt-deux ans sans interruption, qu'il se rapproche de Laurent Fabius et trouve dans le budget de l'État et les finances publiques matière à laisser s'exprimer sa rigueur. Il est propulsé rapporteur général du budget, puis s'attelle, avec le sénateur et ancien président de la commission des finances du Sénat, Alain Lambert, à la réforme budgétaire, qui répond au doux nom de «Lolf».
«Le prélude à un long règne»
En 2000, Migaud s'illustre sur la cagnotte fiscale : il est envoyé à Bercy pour en contrôler le montant à la demande du ministre socialiste de l'Économie, Christian Sautter. Mais tout cela est de l'histoire ancienne. Encore plus depuis que Sarkozy a voulu confier, en 2007, la présidence de la commission des finances de l'Assemblée à un député de l'opposition et que Migaud a décroché le poste. Le 13 janvier dernier, lors des vœux aux parlementaires, le chef de l'État l'a gratifié en public d'un «mon ami», et a même fait état de son «estime personnelle» pour lui. «Il sait élever le débat. Il n'intervient pas sur tout. Il ne se disperse pas, mais choisit au contraire ses sujets», assure Woerth, qui se souvient des récentes critiques du député PS «sur le calcul du bouclier fiscal» ou «l'exonération de droits sur les cessions de part sociale». Migaud avait aussi vivement critiqué, en 2007, le dispositif sur les heures supplémentaires inscrit dans le paquet fiscal. Aura-t-il la même liberté de parole Rue Cambon ? «S'il est trop rigoureux, on dira qu'il est là pour des raisons politiques. S'il ne l'est pas assez, on dira que Séguin était infiniment plus percutant», confie un parlementaire.
Grinçant, le sénateur de l'Oise Philippe Marini estime que cette nomination est «le prélude à un long règne». Didier Migaud, qui a annoncé mardi qu'il abandonnait tous ses mandats électifs, a désormais onze années devant lui. Une éternité sans politique. «Je tourne une page, et je suis obligé d'aller au bout de mes choix», confie le nouveau premier président de la Cour des comptes, qui promet «l'impartialité et la neutralité» dans ses nouvelles fonctions.
(Source : Le Figaro).
15:19 Publié dans France | Lien permanent | Commentaires (0)
Les commentaires sont fermés.