Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 18 avril 2012

Présidentielle : Peut-on empêcher l'annonce des résultats avant 20 heures ?

logo-presidentielle-dossier.jpgLa Commission des sondages annoncera ce vendredi 20 avril des mesures censées empêcher la publication des résultats du premier tour de l’élection présidentielle avant 20 h. Mais peut-on vraiment éviter les fuites ?

Alors que le nom des deux candidats « finalistes » est annoncé par les sondages depuis six mois, la question que tout le monde se pose, à l’approche du 1er tour de l’élection présidentielle, n’est pas de savoir qui sera au second tour, mais plutôt à quelle heure seront annoncés les résultats.

À 20 h, comme la loi l’impose, ou dès 17 h 30, comme de nombreux médias et internautes promettent de le faire, en France et à l’étranger ?

Des mesures annoncées vendredi

Le sujet est tellement sensible que l’institut de sondage TNS Sofres s’est fendu d’un communiqué pour dégager sa responsabilité en cas de fuites, et que l'Agence France Presse, qui s'interroge sur la conduite à tenir, « fera connaître sa position vendredi », selon son directeur de l'Information Philippe Massonnet.

Visiblement dépassée par l’ampleur du phénomène, la Commission des sondages vient d’annoncer qu’elle présentera un dispositif inédit, vendredi après-midi, dont l’objectif est de « protéger le dernier électeur qui va voter », selon un membre du secrétariat de la dite commission.

75 000 € d’amende

Il s’agit d’empêcher que les premières estimations en possession des instituts de sondages ne soient relayées sur Internet dès 18 h, soit deux heures avant la fermeture des derniers bureaux de vote, dans les grandes villes.

La loi française punit sévèrement la publication ou le commentaire de tout sondage, résultat partiel ou estimation des résultats la veille et le jour de chaque tour de scrutin : 75 000 € d’amende pour tout citoyen qui divulguerait des estimations avant 20 h, et cinq fois plus lorsqu’il s’agit de personnes morales, comme les journaux ou sites Internet.

Des fuites inévitables

Pourtant, le quotidien Libération donne rendez-vous à ses lecteurs sur son site Internet dimanche à 18 h 30. Et il est probable que des fuites surviennent sur les réseaux sociaux, tels Twitter et Facebook.

Lors de la présidentielle 2007, et plus encore à l’occasion des derniers scrutins locaux (régionales 2010 et cantonales 2011), des estimations nationales étaient largement diffusées en fin d’après-midi. Sur Twitter, certains internautes donnaient également avant 20 h les résultats complets de leur bureau de vote fermé depuis 18 h.

Au ministère de l’Intérieur, on affirme qu’« il y aura évidemment des rappels à la loi » et que « des dérives et abus qui pourraient être constatés seront sanctionnés ». Mais on concède « qu’il n’y a pas de moyens techniques de bloquer quoi que ce soit ».

Faux comptes Twitter

Les blogueurs qui ont enfreint la loi en 2007 n’ont pas été inquiétés. « J’attends toujours les poursuites », s’amuse Laurent Gloaguen, qui avait publié sur son blog Embruns.net : « Premiers indicateurs : le ciel est bleu », à 17 h, le jour de l’élection de Nicolas Sarkozy, avant de tweeter « Météo : […] Le taux d’humidité est à 54 % », en référence à la première estimation du score du futur président.

« Les spécialistes des faux comptes Twitter auront beau jeu d’en ouvrir par dizaines depuis n’importe quel cybercafé juste pour l’occasion et d’y tweeter allègrement les estimations. Bon courage pour les retrouver », fait remarquer le journaliste Erwann Gaucher, spécialiste des réseaux sociaux.

Les médias belges et suisses poursuivis ?

Le problème semble d’autant plus insoluble qu’il suffira de se connecter aux sites d’information belges et suisses dès 18 h 30 pour connaître les premières estimations. « Nous ne sommes pas concernés par la loi française », assure Christian Dauriac, chef de rédaction de la RTBF.

« Si une information est diffusée sur le territoire français, alors le média tombe sous le coup de la loi française, rectifie Jacques-Henri Stahl, rapporteur général de la Commission nationale de contrôle de la campagne, sur le site du NouvelObs. Les médias belges et suisses sont susceptibles de poursuites. »

Des chiffres dès 17 h 30

La version suisse de 20Minutes a déjà prévu de renforcer l’accès à son site, tablant sur un pic de trafic en provenance de France. « Dès qu’on a des chiffres certifiés comme assez sûrs, on les diffuse par Internet à 17 h 30, indique Jean-Jacques Roth, directeur de l’actualité à la Radio-Télévision suisse. À 18 h, on donne les premières tendances à la radio. »

Et si, selon Maître Eolas, avocat-blogueur aux près de 70 000 abonnés sur Twitter, « tweeter un lien vers un site étranger donnant ces résultats tombe sous le coup de la loi » française, poster un tweet depuis l’étranger ne pourra être sanctionné.

Quel impact sur le scrutin ?

Quant à savoir si la révélation anticipée des sondages sortis des urnes peut avoir un impact sur le scrutin, les avis sont partagés. « Ces fuites ont toujours eu lieu, rappelle le sociologue Dominique Cardon dans Libération. L’avènement de l’espace public numérique ne fait qu’élargir le cercle des sachants […] à des gens qui auront probablement déjà voté. »

Alors que 64 % des Français considèrent ces fuites comme « une mauvaise chose », selon un sondage Harris (1) publié cette semaine, 56 % estiment qu’elles pourraient avoir une influence sur le vote des Français et seulement 12 % sur leur propre choix.

Fermer tous les bureaux à la même heure

« Que se passerait-il si, aux alentours de 17 h, l’information annonçant par exemple Marine Le Pen légèrement devant Nicolas Sarkozy commençait à circuler ? », s’interroge Erwann Gaucher, qui rappelle qu’en 2002, Jean-Marie Le Pen avait devancé Lionel Jospin de moins de 200 000 voix, soit 0,75 % des utilisateurs français de Twitter et Facebook en 2012.

Brice Teinturier, de l’institut de sondages Ipsos, ne croit pas à une inversion des tendances à la dernière minute : « Pour avoir un véritable effet, il faudrait un nombre colossal d’électeurs qui se surmobilisent dans la dernière heure en faveur d’un seul candidat. »

Unifier l’horaire de fermeture des bureaux de vote (à 19 h ?) aurait le mérite de mettre fin au débat. Mais le prochain président de la République et son ministre de l’Intérieur s’attaqueront-ils au problème ?

 

(1) Sondage réalisé en ligne pour M6, MSN Actualités et RTL entre le 13 et le 16 avril auprès de 1 834 individus représentatifs de la population française âgée de 18 ans et plus.

(Source : Ouest-France).

17:30 Publié dans France | Lien permanent | Commentaires (0)

Les commentaires sont fermés.