Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

vendredi, 30 novembre 2007

VENDREDI EUROPE : Premières élections européennes en Roumanie

f0ca04fd09a3ded12ed1d46518855856.jpg

Pour la première fois depuis l'adhésion du pays à l'Union européenne le 1er janvier 2007, les Roumains étaient appelés aux urnes pour élire leurs représentants au Parlement européen,  dimanche 25 novembre. Le même jour, le Président Traian Basescu a convoqué un référendum sur la réforme du système électoral pour le Parlement national. Quels ont été les enjeux et quels sont les résultats de ce rendez-vous électoral ?

Des élections européennes tardives, mais attendues 

Conformément au Traité d’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie signé en avril 2005, les deux pays s’engageaient, suite à leur adhésion, à organiser des élections pour le Parlement européen « avant la  fin 2007 ». Les Bulgares ont voté le 20 mai pour élire leurs 18 députés, alors que les Roumains viennent de le faire ce dimanche avec un peu de retard. 

En effet, la crise politique interne à Bucarest ce printemps a empêché l’organisation de ces élections plus tôt. La dissolution de la coalition du Parti démocrate du Président Traian Basescu et du PNL du Premier ministre Calin Popescu Tariceanu avait finalement déterminé la  suspension du Président Basescu par le Parlement et avait nécessité sa confirmation dans son poste, une nouvelle fois, par l’électorat lors d’un référendum organisé fin mai. 

Malgré ce retard, les élections étaient attendues pour plusieurs raisons. D’un côté, on espérait que la participation roumaine aux élections européennes effacerait le souvenir de la faible participation aux élections pour le Parlement européen enregistrée en 2004 pour les dix nouveaux États membres. De l’autre côté, les élections ont constitué un pré-test électoral pour les partis roumains, avant les élections locales et législatives de l’année prochaine. A cela s’ajoute le référendum soumis aux électeurs le même jour sur la question du passage au système de vote uninominal.

L’euro-optimisme sauvera-t-il les élections ? 

Ces élections européennes en Roumanie, les dernières de la série exigée par les élargissements à l’Est après 2004, ont présenté plusieurs enjeux, dont le plus important est la participation au vote. Après la déception de 2004 où les dix nouveaux entrés ont manifesté peu d’intérêt ou de compréhension pour cet exercice européen, la Roumanie était considérée comme une possible chance d’enregistrer une participation « honorable ». Et cela, d’autant plus que selon les Eurobaromètres, la Roumanie reste le pays le plus euro-optimiste, puisque 66% des répondants roumains déclarent avoir confiance dans le Parlement européen. 

Dumitru Sandu, sociologue et l’auteur du dernier Eurobaromètre sur la question, déclare à ce sujet, pour le journal Gandul : « On peut faire le lien entre le mécontentement des Roumains vis-à-vis de la classe politique nationale et la confiance dans le Parlement européen, ce qui les fera participer en grand nombre. Ils sont très sensibles en ce moment aux débats politiques et si les politiciens savent mettre sur l’agenda des questions concrètes qui intéressent les gens, ils iront voter ». 

Qui plus est, le Président Basescu a convoqué le même jour un référendum sur un sujet qui guette la vie politique roumaine depuis la Révolution de 1989 : le passage au vote uninominal pour les élections législatives. La consultation sur une réforme très populaire constituait un autre argument en faveur d’une participation massive au vote. Gunter Kirchbaum, député allemand, président de la commission pour les affaires européennes et rapporteur pour la Roumanie, en était convaincu : « cela accroît les chances d’une grande participation. Surtout que pour le réferendum, il y a besoin d’une participation d’au moins 50% pour qu’il soit validé ».

Une campagne électorale dominée par des questions internes 

La campagne électorale pour les élections européennes a débuté le 26 octobre. Comme prévu, les questions d’ordre interne ont pour la plupart du temps monopolisé le débat. Des sujets plus techniques, tels que le futur de l’Union ou bien le Traité de Lisbonne, ont souvent été absents de l’espace public. Les sujets qui ont fait la « une » des préoccupations ont été plutôt la libre circulation dans l’espace européen et les conditions de vie des Roumains. 

Les think tanks et les fondations européennes présentes à Bucarest et à Bruxelles ont essayé d’orienter et de nourrir le débat vers des sujets plus « européens », sans trop de succès pour autant. Ainsi, avant le début de campagne, le Bureau Roumanie – UE de Bruxelles, l’Association « Pro Democratia » et le Bureau d’information du Parlement européen en Roumanie ont organisé le 16 octobre la conférence « des thèmes européens pour des élections européennes » afin de souligner les thématiques européennes qui pourrait être soulevées lors de la campagne électorale. 

Plus tard, en milieu de campagne, face à une hyper médiatisation du scandale des Roumains en Italie, la Société académique roumaine, principal think tank bucarestois a organisé le débat « les euro-parlamentaires roumains et l’Europe ». L’événement voulait donner un peu de consistance au débat et invitait les principaux partis à définir leur positions vis-à-vis de nombreux sujets européens tels : le traité de Lisbonne, les fonds européens, les questions internationales ou le régionalisme en Europe. 

Pourtant, le rapport réalisé par l’Agence de contrôle de la Presse, dans un rapport rendu public le 8 novembre, annonce que le cas « Mailat », (le citoyen roumain d’origine Rrom qui a assassiné une Italienne en déclanchant une vague de manifestations anti-roumaines) a sauvé la couverture des élections européennes dans la presse écrite. Le rapport montre, en effet, que la question migratoire a été de loin la plus citée des thèmes européens suivis par le marché du travail européen, les fonds européens et la sécurité communautaire.

Des candidatures variées et inattendues

Militante pour les droits de l'Homme, chanteuse de musique tzigane ou hommes d'affaires se voulant "le sauveur" de son pays : des candidats aux profils très différents se sont affrontés lors des premières élections européennes. Au total, 13 partis politiques, plus un candidat indépendant, ont brigué ce scrutin, qui permettra à 35 Roumains de siéger au Parlement européen. 

Le Parti démocrate du Président Traian Basescu misait sur la compétence de l’ancien Ministre de la Défense, Florin Frunzaverde, placé en tête de liste électorale, pour conquérir l’électorat. Le parti du Premier ministre, PNL (Parti national libéral), en difficulté dans les sondages, a promu Renate Weber, militante pour les droits de l’Homme et présidente de la Fondation Soros pour sortir de l’impasse.

Mis à part les candidats du Parti social démocrate (PSD), de l’Union des Hongrois de Roumanie (UDMR) et de la faction libérale PLG fondé par un économiste et ancien Premier ministre, Theodor Stolojan, des candidatures inhabituelles à la compétition politiques sont apparues. Ainsi, on y a vu Gigi Becali, un richissime homme d’affaires, Gabi Lunca, une chanteuse de musique tzigane de la part du parti des Rroms « Pro-Europa » ou bien l'évêque réformé Laszlo Tokes, fer de lance de l'opposition au régime communiste qui avait entraîné le soulèvement contre Nicolae Ceausescu, en décembre 1989. Ainsi, un large choix pour l’électeur avide de signer la rentrée de la Roumanie en Europe. 

Le PPE augmente ses effectifs, le Parti démocrate sa popularité

A l’issue du vote, d’après les statistiques du Bureau électoral central, la participation a atteint 29,12%. Le score, raisonnable, sans forcément être spectaculaire, est comparable à celui enregistré en République tchèque en 2004 (29%) et en Bulgarie en 2007 (28.6%). 

Le 27 novembre à 13 heures, le Bureau Electoral Central a annoncé les résultats officiels des élections, confirmant ainsi que seulement cinq formations politiques ont dépassé le seuil électoral de 5%.

Le Parti démocrate de l’actuel Président Traian Basescu a accumulé le plus de votes (environ 28,81%) et obtiendra 13 mandats pour le Parti populaire européen. Le Parti social démocrate associé au Parti social européen se trouve en deuxième position avec environ 23,11% des voix exprimées et 10 mandats. Les deux partis libéraux inscrits ont tous les deux dépassé le seuil électoral. Le Parti national libéral du Premier ministre Tariceanu a obtenu 13,44% des voix, soit 6 mandats tandis que la faction libérale PLD a obtenu 7,78% des voix soit 3 mandats. Le Parti de la minorité hongroise (UDMR), avec 5,52% enverra aussi deux députés au Parlement européen pour la famille des populistes européens. Quant aux autres partis et candidats, ils n’ont pas réussi à dépasser le seuil électoral de 5%.

Le référendum sur le vote uninominal : un fiasco 

En ce qui concerne le réferendum, organisé le même jour et dans les mêmes bâtiments que les élections pour le Parlement européen, mais dans des pièces séparées, il n’a pas été validé faute de participation d’au moins 50% des électeurs. D’après le Bureau électoral central, la participation au référendum a été encore plus faible que celle pour les élections européennes. 

Ainsi, seulement 27% des 18 millions de Roumains inscrits sur les listes électorales ont répondu dimanche à la question : « Etes-vous d'accord pour que tous les députés et sénateurs soient élus dans des circonscriptions uninominales, sur la base d'un scrutin majoritaire à deux tours ? ». Pourtant 82% des réponses exprimées ont été favorables à cette réforme. 

A la sortie des urnes, le Président Traian Basescu, auteur de cette initiative, a déclaré : « le référendum d’aujourd’hui constitue une leçon même pour moi, mais je ne vais pas cesser de croire que les Roumains veulent le changement de leur classe politique (…) Le centre dur de ceux intéressés par la vie de la cité, à savoir les presque 30% des Roumains présents au vote, soutiennent le changement des règles d’élection des parlementaires et aucun homme politique responsable ne pourra en faire abstraction ». 

Mais le référendum n’a pas forcément condamné la réalisation de la réforme électorale puisque le Premier ministre Calin Popescu Tariceanu, avait déclaré avant son organisation qu’il engagerait la responsabilité du gouvernement devant le Parlement afin de mettre en œuvre cette réforme.

 

Quels enseignements à tirer ? 

En conclusion, les élections européennes en Roumanie ont montré un électorat sensible aux initiatives de la classe politique nationale et déconcerté sur l’enjeu des élections européennes. 

Pour les politiciens, c’était le moment de tester leur popularité vis-à-vis de l’électorat avant l’échéance électorale de l’année prochaine. Pour le parti du Président, le PD, cela a été une victoire assez puisqu’il a quand même réussi à augmenter considérablement sa base électorale de 14% en 2004 à 32%. Pour le PSD et le PNL du Premier ministre Tariceanu, leur chute libre dans les sondages a été largement confirmée. Le parti radical de Corneliu Vadim Tudor n’a pas réussi à reconduire ses euro-députés et son Président a donné sa démission. La seule surprise est venue de la part du PLD, qui pour la première fois dans l’arène politique a réussi à dépasser le seuil électoral. 

Pour reprendre la conclusion du Président Basescu : « Les euro-élections nous montrent des changements importants dans la hiérarchie des partis en Roumanie, dont je vais personnellement tenir compte puisqu’ils ne sont plus le reflet des sondages mais le vote même des Roumains».

 

Les commentaires sont fermés.